Oasis des artistes: Poésie en ligne, Concours de poèmes en ligne - 6528 membres !
S'inscrire
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 


Mot de passe perdu ?
Inscrivez-vous !
Petites annonces
Qui est en ligne
87 utilisateur(s) en ligne (dont 70 sur Poèmes en ligne)

Membre(s): 2
Invité(s): 85

steve, daniel46, plus...
Choisissez
    Ambre  et   Pierre..........pavoise  à  la  Rochelle
Hébergez vos images
zupimages
Droits d'auteur


Copyright



Index des forums de Oasis des artistes: Le plus beau site de poésie du web / Poésie, littérature, créations artistiques...
   Contes et nouvelles (seuls les textes personnels sont admis)
     Ecrire
Enregistrez-vous pour poster

Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant | Bas
Expéditeur Conversation
Mostafa
Envoyé le :  28/4/2016 23:37
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 2/5/2008
De: AGADIR.MAROC
Envois: 14894
Ecrire
Ecrire

...Quand je n'ai plus rien à dire, je préfère me taire de peur de dire n'importe quoi mais je me mets aussitôt à écrire. Je me mets à écrire de peur d'un mutisme soudain, de peur de perdre complètement la faculté et le privilège de parler; de peur de perdre le langage, les expressions, les mots; de peur de ne plus être un animal parlant...Je me mets à écrire car, en écrivant, je parle en silence sans émettre le moindre son. Je parle en silence dans ma tête... Il m'arrive souvent, pour ne pas dire toujours, de me retrouver sans préméditation au beau milieu de mes semblables, ces animaux dits sociaux, dans un lieu dit public, et me mettre soudainement à parler dans ma tète sans qu'ils ne sachent que je parle. Et pour ne pas oublier ma tirade interne, je prends mon arsenal d'écrivain et me mets aussitôt à l'écrire. Comme ça, j'aurai des traces écrites. Si je ne le fais pas à cet instant, si je le reporte, je ne me rappellerai plus un traître mot et je l'oublierai à jamais. Cela m'est déjà arrivé, je ne referai plus cette bêtise. Un homme averti en vaut deux! C'est pour cela que je vais souvent, pour ne pas dire toujours, au café; ce lieu public par excellence, dans le but d'écrire. (Remarque : Le texte que je suis justement en train d'écrire maintenant et que vous aurez le plaisir de lire plus tard, est écrit dans un café !)
Là, je me permets d'ouvrir une parenthèse et d'avoir l'insolence de soliloquer un peu et cogiter sur le substantif "Café" : Ce nom masculin singulier a un champ sémantique assez large. Mon petit dictionnaire m'apprend savamment ceci: "-Graines du caféier. - Infusion de ces graines, torréfiées et moulues. – Etablissement où l'on sert des boissons, de la restauration légère, etc." C'est ce dernier sens qui m'intrigue.
La langue française serait-elle avare ou pauvre à tel point d'appeler la boisson et le lieu par le même terme?
N'est-elle pas assez riche et assez généreuse pour donner au lieu un nom différent de celui de la boisson? Le débit de boissons alcooliques ne s'appelle-t-il pas "bar" ou "bistrot"? Pourquoi ne l'appelle-t-on pas "vin" ou "bière", par exemple? C'est drôle, on peut dire : "J'ai bu un café dans un café." Imaginez qu'on dise : "J'ai bu du vin dans un vin !" ça ne rime à rien ! Le français est vraiment une langue bizarre qui défie toutes les logiques et adore les exceptions et les irrégularités, sans parler de celles de l'orthographe!... Si vous permettez, je ferme illico presto cette stupide parenthèse qui me couvrira sûrement de ridicule auprès des experts du lexique et des spécialistes de la linguistique et de la rhétorique.
Et je retourne, avec votre permission et votre bénédiction, à mes moutons, pardon: à mes mots!
Je disais donc que le café (je veux dire le lieu où l'on peut siroter du café, du thé ou autres boissons) est mon espace d'inspiration et de création littéraire par excellence. Je mentirais si je disais connaître les vraies raisons qui me poussent à écrire dans les cafés : Chercher l'inspiration en écoutant, à la dérobée, la discussion des autres clients? Voler une phrase, une expression, une figure de style ou même un mot, de la bouche d'un étranger et me l'approprier sans gène et sans honte aucune? Décrire un de mes personnages fictifs tout en observant attentivement le visage, l'allure, l'attitude, l'aspect vestimentaire de quelqu'un qui boit sereinement son café ou son thé sans se douter un instant que je suis entrain de l'étudier soigneusement dans le but de le dessiner avec mes mots et lui donner vie dans l'univers imaginaire de mes textes? (Nombreux sont ces anonymes que je ne connaissais ni d'Adam ni d’Ève et qui sont devenus si familiers depuis qu'ils sont devenus des personnages de mes nouvelles comme Rachida, Kacem, Brahim, Papa, etc.) J’aime aussi prêter l'oreille à ce que disent les gens pour connaitre leurs préoccupations, leurs soucis, leurs besoins, leurs problèmes, leurs rêves, leurs attentes, leur colère, leur révolte, leurs joies. Cela fera de bons ingrédients pour mes écrits. Voilà pourquoi je vais chercher l'inspiration dans les cafés. Il y a peut-être d'autres raisons. Que sais-je? Ce que je sais, ce dont je suis sûr comme de la couleur de mes chaussures, c'est que j'aime écrire dans un café. J'adore me trouver au milieu de cette cacophonie humaine, ce tumulte incessant, ce brouhaha citadin. La présence, les voix, la chaleur, les gestes de ces animaux dits sociaux, me rassurent, me prodiguant un espace, une atmosphère et une ambiance idéale et favorable à l'écriture. Cela peut paraître bizarre, je l'avoue. D'autres auteurs cherchent le calme parfait, le silence absolu, la sérénité et la paix pour enfanter. Autrement, écrire une seule phrase leur serait impossible : le moindre son, le bruit le plus infime, les irritent, les perturbent et leur font perdre le fil de leur pensée. Aux antipodes de ces augustes hommes de lettres dignes de ce titre, moi c'est le silence qui m'effraie et m'angoisse. J'ai besoin de la présence de mes semblables. J'ai besoin de fondre dans l'anonymat de la foule pour me sentir en sécurité. J'ai besoin d'être entouré des autres et j'ai horreur de me sentir seul. J'ai peur de la solitude. Elle me donne cette étrange impression d'être oublié, rejeté, abandonné, banni, honni, damné! En plus, ce que j'écris (nouvelles, poèmes, articles, portraits) ne demande pas tant de silence et de calme, tant de concentration et de méditation. Ce que j'écris est loin des productions littéraires des grands auteurs. Je n'ai jamais eu ni l'ambition ni la prétention d'écrire un chef-d’œuvre ou un Best-seller. Moi, je ne suis qu'un petit rimailleur qui adore écrire; un petit auteur inconnu des lecteurs à cause de l'indifférence des éditeurs; un tout petit poète qui n'arrive pas à la cheville d'un Baudelaire ou d'un Molière!
...Pour être honnête (je m'évertue toujours à l'être malgré les tentations des choses et des êtres), je ne sais pas d'où me vient cette étrange envie, ce besoin pressant, ce plaisir brûlant, ce désir ardent, cette urgence cinglante d'écrire. Est-ce pour vomir le fiel et l'aigreur qui bouillonnent dans mon for intérieur? Peut-être pour extraire mes peurs, mes douleurs et mes frayeurs et guérir mes maux avec mes mots? Et si c'était pour des raisons plus sérieuses et plus vitales : Relater les misères et les malheurs des petites gens, dénoncer les ignominies et les horreurs de ce monde immonde, démasquer les despotes et les tyrans, combattre les extrémistes, les terroristes et les ennemis de la vie? Est-ce pour d'autres raisons qui restent mystérieuses, sibyllines et bien enfouies dans l'inconscient? Que sais-je? Ce que je sais, ce dont je suis sûr comme de mes battements de cœur, c'est que j'aime écrire. J'adore écrire ce qui me trotte dans la tète, ce qui vibre dans mon cœur, ce qui gronde dans mes viscères. Et en écrivant, je me permets tout et ne me prive de rien. Durant mon soliloque interne, aucun interlocuteur n'est là pour m'interrompre, me contredire ou m'interdire de dire. J'ai tout le loisir de dire tout ce que je désire et de la manière que je préfère. Je choisis le niveau de langue qui me chante, les expressions qui m'enchantent et les mots qui me tentent. Je suis le maître absolu et le constructeur du texte; Je choisis son fond et lui donne sa forme; Je crée son architecture et le battis phrase par phrase du début jusqu'à la fin. Les mots sont miens, je peux, par exemple, les murmurer, les épeler, les ânonner, les répéter, les prononcer lentement ou les lancer rapidement comme une balle de tennis. Je peux les découper en syllabes, les juxtaposer, les opposer, les faire exploser comme des obus. Je peux aussi les faire tinter, sonner, frissonner, résonner ou gronder. Je peux les hurler à m'époumoner, les faire grincer ou les faire bruire comme les feuilles des arbres. Je peux en faire ce que bon il me semble, les exploiter à ma guise tant qu'ils disent ce que je veux qu'ils disent ! Je peux en faire ce que je veux du moment que cela se passe dans ma tête et que personne ne les écoute. Les clients et le patron du café ne risqueront pas de me prendre pour un fou à lier ni de téléphoner à ces anges tout de blanc vêtus pour qu'ils viennent me mettre la camisole de force et m'enfermer dans une cellule nue jusqu'à ce que je devienne réellement cinglé !... Ils me voient, écrivant tranquillement, silencieusement, sagement comme un écolier studieux rédigeant une expression écrite. Ils n'entendent pas mes mots. Ils ne se doutent point du volcan qui mijote dans ma tète. Ils ne voient pas cette fourmilière de mots grouillant dans ma tête. Personne n'entend mes mots. Personne ne se doute de leur importance, de leur impact, de leur influence, de leur valeur, de leur richesse, de leur présence existentielle... Lorsque je mets mes mots noir sur blanc, dès que je les écris, je les vois prendre vie et s'animer comme s'ils naissaient. Ils se mettent aussitôt à parler, à gesticuler, à protester, à jouer du coude, à grommeler, à se bousculer pour avoir la meilleure place dans la phrase, pour être mis en valeur, pour être sur un piédestal! Cela dépend du sens que je leur donne et souvent de celui qui se trouve dans le dictionnaire, propre ou figuré, simple ou imagé. Cela dépend de leur poids, de leur masse, de leur prix, de leur valeur. Cela dépend de leur longueur, de leur couleur, de leur odeur, de leur saveur... Quand j'écris par exemple le mot «amour», mon cœur se met à frémir dans ma poitrine voulant sortir, et je pousse un soupir en pensant à tous les tourtereaux, à tous les amoureux, à tous les malheureux atteints de la terrible maladie de l'amour. En écrivant le mot «terrorisme», je vois le sang des innocents, je vois des gens décapités, estropiés, mutilés et j'ai le hante-le-cœur, une envie soudaine de pleurer, une rage et une douleur insupportable. Il me suffit d'écrire le mot "liberté" et je vois des hommes et des femmes briser les chaînes, des peuples qui se déchaînent, des nations qui se révoltent et se rebellent et me poussent des ailes!
... Les mots ne sont point innocents, point insignifiants, même les plus petits, les plus frêles, les plus anodins. Les mots sont tellement vivants! C'est pour cette raison que je suis plein d'émotion en écrivant. Cet exercice plein de volupté et de raffinement m'excite et me bouleverse tellement que je me laisse captiver, m'éblouir et m'émouvoir, imaginant tout ce que les mots dénotent et connotent. Je marie leur signifiant et leur signifié qui me deviennent familiers comme par magie. Je déborde alors de vivacité, d'enthousiasme, de fougue et de gaieté.
...Confiant et vaillant, j'essaie donc de m'approprier les mots, de les dompter, de les domestiquer, de les garder jalousement dans ma tête, en vain! Les mots sont libres, réfractaires, indomptables et rebelles. Dès que je les prononce, ils prennent la poudre d'escampette et vont gambader dans l'espace comme la chèvre de monsieur Seguin gambadant dans la montagne défiant la peur des loups!...L'espace qui nous entoure est, paraît-il, plein à craquer de tous les mots prononcés par les animaux parlants depuis qu'ils avaient acquis la faculté et l'art de la parole. Les mots s'y meuvent en toute liberté comme un aigle planant majestueusement dans le firmament! On ne les voit pas, on ne les entend pas, on ne les touche pas, cependant ils sont là, physiquement, superbes, en chair et en os, en consonnes et en voyelles, bien en vie jusqu'à la fin de la vie. Incroyable mais vrai : Les hommes passent leur vie à pérorer et à radoter et partent et leur mots restent!
Les mots perdurent, persistent et persévèrent. Les mots sont éternels et les hommes sont éphémères!
...Moi qui adore les dictons, les maximes et les citations sans pour autant être capable de les apprendre par cœur. Même mes propres poèmes, je ne peux les citer de mémoire et dois les lire comme s'ils étaient écrits par un autre. Il m'arrive même d'être surpris en lisant une phrase ou un vers et je me dis : "C'est moi qui ai écrit ça?" C'est bizarre, n'est-ce pas? J'ai une mémoire de moineau, je dois l'avouer. Je n'ai ni le génie, ni l'éloquence, ni la mémoire d'un Fabrice Luchini. Cependant, en guise de conclusion, je suis heureux de partager avec vous, cher lecteur potentiel, cette belle citation qui résume à merveille ma conception de l'écriture : Dans son livre intitulé " L'homme joie", Christian Bobin a dit : Ecrire, c'est dessiner une porte sur un mur infranchissable, et puis l'ouvrir."...Il a tout dit. Quelle merveille! Dans une petite phrase, il a dit ce que j'ai eu du mal à dire dans plusieurs pages. Cela n'est-il pas une autre preuve de la magie des mots?
...Enfin, je souhaite que les portes ouvertes par les auteurs et les poètes nous apportent un souffle nouveau, un horizon radieux, une lueur d'espoir, une envie féroce de vivre, un entêtement têtu de croire en notre humanité en dépit de toutes les horreurs et atrocités qui empestent notre cité et noircissent notre vie. Je souhaite également que les animaux parlants se taisent un peu et lisent beaucoup. La lecture leur permet de voir cette porte ouverte par les auteurs; cette porte qui les fera sortir de leur noirceur et les guidera vers la lueur!..."lire" sera donc le titre de mon prochain texte, si j'ai encore cette étrange envie, ce besoin pressant, ce désir ardent, ce plaisir brûlant...d'écrire!

Agadir, le 25/04/2016



----------------
Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
...............................................................................................
Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!

orteng
Envoyé le :  29/4/2016 9:08
Plume d'or
Inscrit le: 24/1/2015
De: Scherwiller Alsace
Envois: 1648
Re: Ecrire
Bonjour Mostafa,

A te lire, on se rend bien compte que tu es un véritable amoureux des mots.

D'ailleurs, si je peux me permettre,je te dirais que ton texte est merveilleusement bien écrit.

Je vais m'offrir une deuxième lecture sur le champ...

Amitiés

Orteng
Ougounnine
Envoyé le :  6/5/2016 12:19
Plume d'or
Inscrit le: 11/6/2009
De: Maroc
Envois: 563
Re: Ecrire
Un texte de toute beauté et d'une grande profondeur. Un monologue que j'ai relu à plusieurs reprises tant il me parle !
Merci pour ce très beau partage !


----------------
Pouvoir, c'est vouloir

Mostafa
Envoyé le :  8/9/2016 19:19
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 2/5/2008
De: AGADIR.MAROC
Envois: 14894
Re: Ecrire
orteng
Ougounnine

Mille mercis d'avoir lu ce que j'ai écrit!


----------------
Ma vie n'est plus une barque dans une mer enragée
Et je ne suis plus le naufragé!
...............................................................................................
Mostafa, point fat, seul, las, si doux, rêvant de sa mie!!!

Sybilla
Envoyé le :  13/8/2021 22:56
Modératrice
Inscrit le: 27/5/2014
De:
Envois: 95320
Re: Ecrire
Bonsoir Mostafa,

Magnifique écrit en partage que tu nous livres en confidences !



Belle soirée !
Amitiés
Sybilla


----------------
Presque toutes mes poésies ont été publiées en France et ailleurs avec les dates "réelles" de parution.


Le rêve est le poumon de ma vie (citation de Sybilla)

Par conversation | Les + récents en premier Sujet précédent | Sujet suivant |

Enregistrez-vous pour poster