Ah ! Pourquoi reviens-tu, dans ce Babel de bulles,
Toi l’aède ingénu, l’impénitent rêveur?
Tu quittes ton cocon pour un toit de vapeur !
Il ne fleure pas bon là où tu déambules.
Le fétide jasmin d’un printemps en errance
Exhale les relents des espoirs suspendus,
Des idéaux déchus sur les chemins perdus
OĂą la rage vomit sa bile froide et rance.
La terre sent le sang, l’air, la poudre incendiaire,
Le vent gonfle les cris, l’hiver est de retour !
Vieux, femmes et enfants en détresse le jour,
De nuit chair Ă canons pour junte militaire.
Mais toi, le rimailleur, sous ton voile de brume
Le temps qu’il fait dehors, tu sembles l’ignorer :
Un soleil décadent, des cœurs à dégivrer
Des désirs décimés par le vent d'amertume.
Il vente et pleut à flots sur les âmes meurtries ;
Et le rêve dérive à l’horizon brûlant
Où rugit l’inconnu comme un typhon cinglant
A l’heure des départs et des larmes taries
Il gèle à pierre fendre en ces pays d’asile.
Des bourrasques de doute, ébranlant les défis,
Emplissent de douleur les regards déconfits,
Pitoyables reflets d'un renouveau débile.
Vous me raillez, l’amie, ô la double souffrance!
Je suis ni l’isolé, ni l’indolent songeur ;
Les vœux des indignés j’en suis le défenseur
Le souffle de mes vers a brisé le silence.
Je rêvais d’un printemps aux couleurs d’espérance,
Où s’épanouit le cœur épris de dignité.
Ce trouble de saison et ce ciel agité
Ont flétri les bourgeons du jour de délivrance.
Mais j’irai jusqu’au bout du chemin de la lutte.
Mes désirs étouffés laissent l’encre couler
Pour qu’aux brins de jasmin puisse encore perler
La fleur de liberté bercée au chant des flûtes.
Khadija(Brisemarine)