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   Lettres d'amour
     Lettre posthume Ă  mon père
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Expéditeur Conversation
berrichonne
Envoyé le :  2/7/2013 21:34
Plume de diamant
Inscrit le: 17/6/2008
De:
Envois: 16938
Lettre posthume à mon père


Papa,


Cette lettre tu ne la recevras pas, les autres n’ont plus ne te sont pas parvenues, je veux dire celles que souvent j’ai pensé t’envoyer, lorsque je n’allais pas bien. Tu étais mon confident en pensée plus que dans la réalité. Que n’occulte-t-on pas au nom de cette Sainte pudeur conjuguée à ce satané orgueil ! Cette ultime lettre qui me sert d’exutoire, me rapproche de toi et te fait revivre .

Tu as choisi de partir le dernier jour de Juin 1997, le 30, un lundi, dans un magistral pied de nez à la journée qui commençait, inutile à tes yeux, puisque habité depuis 3 mois par une maladie que l'on-dit cruelle mais que je qualifierai d’injuste et dont tu connaissais l’issue. Je me demande si tu avais « choisi » ce premier jour de semaine comme un refus de ne pas en aborder une autre, persuadé à juste raison, que cela ne changerait rien aux souffrances physiques et aux questionnements trop tardifs pour pouvoir apporter des réponses.

J’étais allé te rendre visite, enfin si l’on peut dire, 3 jours auparavant, pour la St-Jean jour de ta fête, le 24 juin. Cette St-Jean là (il y en a deux sur le calendrier) qui signait le début de l’été, tu l’affectionnais particulièrement pour je ne sais quelle raison, peut-être le feu symbole de chaleur, d’embrasement mais aussi de destruction.

Je revois cet hôpital, la chambre à deux lits qui me hante encore aujourd’hui, impersonnelle, froide, sans chaleur avec son arrière goût de tristesse et toi, au fond de la pièce, assis dans un fauteuil près de la fenêtre, fermant les yeux sur un paysage que tu ne voyais ou ne voulais plus voir, ta tête penchée sur le côté, soutenue par ton bras droit. Tu ne m’as pas reconnue tout de suite, perdu dans un ailleurs où je ne figurais sans doute pas. Submergée par l’émotion et la surprise de te voir à ce point changé physiquement, je retenais des larmes qui ne demandaient qu’à couler et essayai de contraindre ma voix à une intonation normale. Ce fut le moment le plus dur. Faire comme si.....Comme si tu étais en pleine santé, comme si ta vue ne s’était pas altérée, comme si tu n’avais pas de difficultés à t’exprimer, comme si tu n’avais pas maigri outrageusement, comme si tu n’allais pas mourir.

Je me demande encore aujourd’hui où j’ai puisé la force de te regarder sans faiblir, le premier moment de stupeur passé. Je m’appliquais désormais à te distraire et à t’assurer de mon amour filial, s’il en était encore temps. Progressivement, tu t’es habitué à ma présence; tu avais oublié quelque peu le son de ma voix mes visites étant limitées par les 500 kilomètres de distance nous séparant. Pourtant, nombreux avaient été nos échanges téléphoniques quand ta conscience était encore intacte, et que, nous échangions, en connaissance de cause mais sans nous l’avouer, nos derniers mots, empreints de la tendresse qui fut nôtre tout au long d’une existence compliquée pour l’un comme pour l’autre.
Déjà trois ans que tu es parti pour le grand voyage d’où on ne revient pas ! Il n’y pas un jour où je ne pense à toi, surtout le soir, seule dans ma chambre, enfin seule, avec mes pensées, mes souvenirs.
L’absence est insidieuse, elle s’installe sans bruit, impalpable, et vous ronge en dedans. Longtemps, j’ai attendu ton coup de fil à 11h moins le quart le dimanche soir après le film, comme à l’accoutumée. Il faut du temps pour s’habituer au manque. Pourtant je rageais, arrachée à ma torpeur par l’indiscrète sonnerie du téléphone. encore imprégnée du film qui venait de se terminer. Comme je voudrais que tu me déranges à nouveau. Papa tu me manques terriblement. Ta photo trône à côté de mon ordinateur, je ne la regarde pas. Il me suffit qu’elle soit là ! Mais si par hasard mes yeux se posent sur elle alors je revois comme un flash, ta silhouette un peu voûtée, ton air docte et surtout tes yeux qui me scrutent, des yeux inquisiteurs parfois dérangeants. Et alors l’émotion me submerge, mes yeux pleurent, sur toi, sur moi, sur ces moments dont nous n’avons pas su profiter et qui ne reviendront plus.

Quand le moment sera venu, j’irai reposer à côté de toi, dans ce petit cimetière qui domine les vignes, mais plus à l’ombre des pins. Tu te souviens comme ils se dressaient, les fanfarons, au-dessus des tombes. C’est terminé ! la tempête de 1999 a eu raison de leur insolence et les a foudroyés. Il nous reste cette belle petite église romane adossée au cimetière, qui égrène, imperturbable, à ces fidèles locataires, l’heure.

En attendant, je te garde bien au chaud, dans mon coeur, une place de choix. Tu ne connaîtras pas tes arrières petits enfants mais sois assuré que je saurais leur parler de toi. Je vais continuer à venir te saluer là où tu reposes désormais, le chagrin chevillé au corps, et refuser encore et toujours ce départ si rapide.

Papa, je m’arrête pour l’instant. Ce n’est qu’un faux départ, tu es dans tous mes actes, toutes mes pensées. Je ne veux surtout pas ne plus penser à toi, et pourtant, la vie continue, elle reprend le dessus et je me surprends même à t’oublier quelquefois pendant une heure ou deux.

A ce soir. Quand la nuit sera venue, que je serai allongée dans le calme de ma chambre, nous pourrons communier à nouveau.


CHUT.



Ta miche


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La vie est belle il faut savoir l'apprécier.

jessye
Envoyé le :  3/7/2013 17:55
Mascotte d'Oasis
Inscrit le: 17/12/2006
De: dans mon château de brumes ...
Envois: 20093
Re: Lettre posthume à mon père
terriblement poignant ... des mots qui me parlent ... des départs qui nous laissent un vide que rien ne peut combler ....

toute mon affection ... grande ...


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C'est beau d'ĂŞtre seul(e).
ĂŠtre seul(e)ne signifie pas ĂŞtre solitaire.
Cela signifie que l'esprit ne vit pas sous influence et qu'il n'est pas pollué
par la société.
[Jiddu Krishnamurti]

pierwatteble
Envoyé le :  5/7/2013 20:42
Plume de platine
Inscrit le: 3/11/2007
De: 73410 LA BIOLLE
Envois: 2041
Re: Lettre posthume à mon père

Un texte empreint d'émotion qui me remémore des instants semblables car je les ai vécus pareillement.
La première chose qui nous étreint c'est la peur d'oublier, comme si nous savions intuitivement que le temps ferait son oeuvre, quoi que nous fassions: le souvenir lui-même subira des transformations, puissions-nous en retenir le meilleur. Quant à tout ce que nous avons pu manqué pour toutes ces raisons que vous invoquez...Sachez que nous ne pouvons pas, jamais, tout partager de l'un à l'autre, c'est impossible et ce qui a pu l'être est en soi le vrai cadeau de la vie, fût-il partiel. Il faut du temps pour faire son deuil, et je pense que votre papa vous aurait conseiller de vivre pleinement. Vivez pleinement pour votre famille, ce qui n'est pas rien !
Le texte est bien Ă©crit. Courage !


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berrichonne
Envoyé le :  5/7/2013 21:03
Plume de diamant
Inscrit le: 17/6/2008
De:
Envois: 16938
Re: Lettre posthume à mon père
Jessye et pierwatteble merci Ă  vous 2. Vos mots me touchent.

Je vous embrasse

Michèle


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La vie est belle il faut savoir l'apprécier.

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