Comme un guépard qui guette, je m’assoie et j’attends, comme un pêcheur qui largue son hameçon dans les profondeurs sans être sûre si la chance lui sourirait, si les poissons passeraient et seraient saisis par la tentation de goûter à son appât.
J’attends avec l’espoir d’un amoureux solitaire qui attend le passage hasardeux d’une princesse amoureuse et rêveuse d’une rencontre miraculeuse avec un prince charmant tant désiré....
J’attends comme un voyageur égaré dans un désert immense, sans boussole, sans monture et sans destination, les grains de sable lui rendent la marche encore plus difficile, le soleil brûlant l’incite à presser le pas en l’empêchant d’ouvrir grand les yeux non pour admirer le paysage mais pour repérer les horizons et tracer un chemin qui le mènerait vers une issue….
Comme un amoureux sans expérience, j’ouvre mon cœur comme ouvre ces voiles un bateau prêt à naviguer dans l’immensité incertaine de l’océan…. Tous les vents se cachent derrière les montagnes, ils caressent les petites herbes brulées par la chaleur du soleil pour les faire pleurer tout en les chatouillant avec beaucoup de souffrance en les faisant danser jusqu’a l’écrasement …..
Les voiles las d’attendre une visite à l’improviste se rétrécissent, se ramassent envahies par l’énorme poids de la fatigue et d’attente en vain, leurs plis causent des dégâts énormes tels des cicatrices inguérissables, ces plis saccagent les voiles, ils effacent leur beauté et réduisent au néant l’éclat de leur peinture artistique magique et signifiante, comme des rides qui éliminent sur un visage jeune son sourire éclatant…..
Le soleil allume son feu et brûle l’eau troublée de la mer, le sel se protège en s’enfonçant dans les profondeurs laissant aux gouttes d’eau le choix de voler en se vaporisant….
Je contemple le visage déçu de la femme aux lunettes noires qui regarde tristement le visage de la mer calme très calme sans aucune vague aucun bruissement de vent, ces yeux quittent les silhouettes des enfants qui prennent la fuite et reviennent se fixer sur les vendeurs ambulants qui passent et repassent en lançant aux clients des regards suppliants et en avançant timidement autour des tables comme le font ces nombreux chats affamés qui rodent autour, et qui ont appris avec le temps des manières fantastiques pour demander de la nourriture, ils vont jusqu’à se mettre debout et tirer avec leur griffe la manche d’une veste, pierre Cardin, ou une robe de haute couture pour attirer l’intention et réclamer des miettes qui ne coûterons rien aux gents qui s’attablent, quelques-uns les chassent méchamment, d’autres leur sourit en leur offrant généreusement plusieurs bouchées….
Le chat noir vient s’accroupir sous ma table, il cherche un abri qui le met hors des menaces des serveurs furieux de voir se multiplier ces chats qui perturbent et dérangent les clients durant le repas, le chat noir s’abrite du soleil foudroyant et brûlant, il remue sa queue propre et pointue pour chasser les mouches et se rafraîchir, on dirait que ce chat noir me connaît, son regard perçant me défi comme une question à laquelle je ne trouve point de réponse, une question qui perce l’intelligence de l’homme dans un silence et une soumission absolue. Si seulement je pouvais partager avec lui quelque chose, mon café noir commence à froidir, mais les chats n’aiment pas le café peut-être à cause de sa couleur.
Le petit garçon jongle avec beaucoup d’adresse son ballon blanc et noir, ses deux sœurs l’imitent en faisant un effort masculin ce qui pousse l’aînée à l’épuisement, elle quitte la scène du jeu et vient s’assoir sur la table qui était juste à côté de la mienne, et sur laquelle des livres en BD destinés aux enfants étaient délaissés ; avec deux tasses de café au lait et deux bouteilles de limonades, les mouches qui profitaient de l’absence des enfants prennent fuite à l’arrivée de la grande sœur, qui met ses lunettes noire et saisit le grand album de Mickey, un autre album était posé à côté d’un journal en langue arabe, la grande sœur ouvre l’album de Mickey et commence sa lecture comme une grande intellect.
L’un des vendeurs ambulants accoste deux touristes qui ont pris une table devant celle de la dame aux lunettes noires. Le vendeur reste accroupi comme un chat, il lance un sourire hypnotisant et fait sortir un petit miroir carré il le donne à l’un de ces clients qui a déjà posé une paire de lunettes sur son nez il prend le miroir et commence à ajuster ses lunettes noires, le vendeur reste accroupi avec beaucoup de modestie tel un humble Fakir, il tire une autre paire de lunettes dans un sachet de plastique, il tire les lunettes avec adresse les essuies délicatement avant de les présenter au second client qui pose son verre de jus d’orange sur la table, il saisit les lunettes et lit à haute voix, « RYBAN »
-"Pas des vrais,, mais une vraie imitation" lui souffle le vendeur avec une voix douce et basse comme s’il lui révélait un secret professionnel….
La femme aux lunettes noires sourit à tous les passagers qui ne pouvaient s’empêcher de la démanger avec stupéfaction et tant d’admiration. Le chat noir remue de plus en plus sa queue pointue, je ne sais s’il s’agit d’un pressage ou d’un accord…..
Ă suivre